Cérémonie commémorative à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l'état français et d'hommage aux "Justes" de France

   Discours du 16 juillet 2022


Je ne souhaite pas ici faire un cours d’histoire car je n’en ai ni la capacité, ni les compétences mais je souhaiterais rappeler quelques faits .

Pour beaucoup, la guerre, la déportation, la Shoah c’est loin.

Loin dans le temps . C’était au siècle dernier.

Il y a 80 ans le 20 janvier 1942 la conférence de Wannsee, en 1h30 entérine la mise en œuvre de la solution finale de la question juive en Europe. La mise à mort programmée de millions de personnes est actée.

Le 27 mars 1942, le 1er convoi quittait Drancy pour Auschwitz via Compiègne emmenant 1112 personnes dont seulement 23 furent survivantes en 19451.

Cette seule année 1942, 43 convois quittèrent la France.

Loin géographiquement. Pitchipoï, cette destination inconnue, mystérieuse et redoutable.

Les camps sont à des milliers de kilomètres, dans des lieux avec des noms qu’on a du mal à orthographier ou à situer sur une carte. Theresienstadt, Dachau, Bergen Belsen, Majdanek, Auschwitz-Birkeneau.

Pourtant tout n’est pas si loin.

Certains d’entre vous sont peut être déjà aller à Dijon « Rue des normaliens fusillés et de leur camarade ». Oui la barbarie nazie a aussi frappé non loin d’ici.

Une école dijonnaise, à deux pas du port du Canal, a été un lieu d’internement pendant 1 semaine en 1944. Elle porte maintenant le nom de la seule survivante de cette rafle de février 1944 : Paulette LEVY.

Avant de procéder à la lecture des noms des 21 victimes en Côte d'Or de la rafle de juillet 1942, permettez moi d'évoquer le souvenir de certains juifs de Côte d'Or déportés durant cette année 1942.

Maurice Bigio, jeune étudiant en mathématique arrêté au Lycée Carnot au matin du 26 février 1942 en représailles d’un attentat à Chalon sur Saône, il sera déporté par le convoi n°2.

Margot Kahn, 13 ans arrêtée avec son père à Chatillon sur Seine en octobre 1942, sa mère avait été arrêté en juillet 1942

Clara, Justina et Tilla Frenkel, 3 femmes allemandes qui avaient trouvé refuge à Chenôve en 1938, arrêtées elles aussi en octobre 1942

La rafle des 16 et 17 juillet 1942, dite rafle du Vel’ d’Hiv’, marque un tournant décisif dans l’application de la « Solution finale de la question juive » en France.

Réclamée par l’occupant et menée exclusivement par la police française, pour la première fois, les femmes et les enfants ne sont pas épargnés.

En Côte d’Or cette rafle avait été organisée quelques jours plus tôt les 13 et 14 juillet aboutissant à l’arrestation de 24 personnes. Certaines étaient originaires ou résidaient en Côte d'Or et d'autres ont été arrêtées à Crépey. Dans ce hameau se trouvait un chantier forestier où étaient retenus des hommes juifs originaires de la région parisienne.

Les 24 personnes ne furent pas toutes déportées. En effet les époux Roudnik et Salm Mathilde2 ont été remis en liberté sur ordre des autorités allemandes. Les époux Roudnik seront de nouveau arrêtés3 et déportés en juin 1943.

Le 14 juillet 1942, 21 personnes quittent la cour de Bar4 où elles étaient rassemblées, laissant derrière elles, un mari, une mère, des enfants5 pour rejoindre la gare.

A 12h56, sous escorte de la gendarmerie, elles quittent la gare de Dijon pour le camps de Pithivier.

Elles s’appelaient :

Hermann GERSON, 37 ans, arrêté à  Crépey,
Malka HERKOWITZ, 38 ans, vivant rue Jean Jacques Rousseau à Dijon,
Erna KAHN, 40 ans, réfugiée d’Alsace à Châtillon-sur-Seine,

Szmul KALEKA, 44 ans, de Voulaines-les-Templiers,
Thérèse KATZ, 17 ans, habitant à Dijon rue Paul Thénard,
Herta KOHLMANN, 21 ans, vivant rue Babeuf à Dijon (rue de la Chouette),
Aron KUPERBERG, 18 ans, arrêté à Crépey
Ruberg MAKAROWSKI, 44 ans, également arrêté à Crépey
Edmond MICHEL, 37 ans
Irma MICHEL, 34 ans et
Lillie MICHEL, 40 ans, tous trois de Dijon, rue de la Charmette
Anita OPPENHEIMER, 19 ans habitant Dijon, rue Paul Thénard
Jaqueline RIBSTEIN, 19 ans également de Dijon, rue des Perrières
Erich ROSNER, 17 ans arrêté à Crépey
Severin SAFRYS, 28 ans arrêté à Messanges
Nathan SALTMAN, 29 ans  et
Samuel SCHACHTER, 36 ans arrêtés à Crépey
Rose STEINITZ, 44 ans, et
Mireille STEINITZ, 17 ans vivant à Dijon, avenue Victor Hugo
Rachel ZLOTOWITCZ, 36 ans habitant Dijon, rue de la Manutention
Joseph ZYSKIND, 41 ans arrêté à Crépey.

Le 17 juillet, elles étaient déportés par le convoi numéro 6 vers Auschwitz Birkenau, vers une mort programmée par les nazis, avec la complicité du gouvernement de Vichy.

Selon les informations à notre disposition, seul Samuel Schachter6 a survécu à la déportation. Jacqueline Ribstein7 est parvenue, quant à elle, à échapper à la déportation grâce au courage de son mari Jean Chaillet qui l'a fait libérée de Pithiviers.

Tous les autres ont rejoint la longue liste des 76 000 Juifs déportés depuis la France entre 1942 et 1944, hommes, femmes, enfants assassinés dans le cadre de la Shoah.

Alors à l’heure où certains veulent réécrire l’histoire n’oublions pas que c’étaient nos voisins

 

 

 






1La Shoah en France, volume 2, Serge Klarsfeld

2Archives départementales de la Côte d'Or (ADCO) 1090W41

3ADCO 1090W41

4« Etre juif sous l'occupation » Alain Bellassene

5ADCO 41M294

6http://convoi6.perso.neuf.fr/

7ADCO 1090W41

 

 

 

 

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