Cérémonie commémorative à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l'état français et d'hommage aux "Justes" de France

Discours de Sylvain Blandin

22 juillet 2018

Chaque année, au cours de cette cérémonie nous faisons notre devoir de mémoire, nous citons les noms des victimes pour qu'elles ne soient pas oubliée et espérons que cela ne se reproduise pas . Et pourtant l’actualité nous rappelle avec force que le travail de mémoire est essentiel.

En 2018, 76 ans après avoir échappé à la Rafle du Vel d’hiv, Mireille Knoll est assassinée parce qu’elle est juive. Dans le même temps, le gouvernement polonais promulgue une loi condamnant tout travail historique sur l’implication de la population polonaise dans l’extermination des Juifs d’Europe, des gouvernements européens ferment leurs frontières, leurs ports aux migrants et parfois condamnent ceux qui leur viennent en aide.
Comme le rappelait en 1995 le président Jacques Chirac : « N’acceptons pas d’être les témoins passifs, ou les complices, de l’inacceptable »1.

Il nous a semblé important, dans ces temps de repli sur soi, de mettre à l’honneur ceux qui, en Côte d'Or, au péril de leur vie sont venus en aide aux Juifs de France.
Mme Germaine Lefebvre qui vivait à Jailly les Moulins, recueillit au printemps 1944, Danièle Kahn alors âgée de 12 ans originaire de Paris et recherchée par la police.
C'est chez Mme Louise Osterberger, habitante de Laignes, qu'arriva au printemps 1943 Jacqueline Schochat, âgée de 5 ans. Le père de Jacqueline avait été arrêté en 1941 et faisait partie du 1er convoi de déportés.
La famille Grosman, Daniel, Léa, Ruth, Ruda et Judith, a échappé à la déportation grâce à M Gilbert Pasquier. Gendarme dijonnais et voisin de la famille il les aida à passer la ligne de démarcation.
Ces trois personnes se sont vues décerner par l'état d'Israël le titre de Juste parmi les Nations.
Permettez moi d'associer à cet hommage tous ceux qui, même sans la reconnaissance du titre de Juste, comme Emile Duvault, ou de façon anonyme sont venu en aide à des êtres humains en danger.

La rafle des 16 et 17 juillet 1942, dite rafle du Vel’ d’Hiv’, marque un tournant décisif dans l’application de la « Solution finale de la question juive » en France.
Réclamée par l’occupant et menée exclusivement par la police française, pour la première fois, les femmes et les enfants ne sont pas épargnés. Cette rafle visant essentiellement les Juifs étrangers se solde par l’arrestation, à Paris et en banlieue, de 13000 personnes dont 4 000 enfants de 2 à 16 ans2. Leur seul crime était d’être nés juifs.
Cette rafle avait été rendu possible par l’utilisation d’un fichier de recensement des Juifs établi par les services de Vichy deux ans auparavant.

En Côte d’Or cette rafle avait été organisée quelques jours plus tôt les 13 et 14 juillet aboutissant à l’arrestation de 24 personnes. Certaines étaient originaires ou résidaient en Côte d'Or et d'autres ont été arrêtées à Crépey. Dans ce hameau se trouvait un chantier forestier où étaient retenus des hommes juifs originaires de la région parisienne.

Les 24 personnes ne furent pas toutes déportées. En effet les époux Roudnik et Salm Mathilde ont été remis en liberté sur ordre des autorités allemandes3. Les époux Roudnik seront de nouveau arrêtés4 et déportés en juin 1943.

Le 14 juillet 1942, 21 personnes quittent la cour de Bar5 où elles étaient rassemblées, laissant derrière elles, un mari, une mère, des enfants6 pour rejoindre la gare.
A 12h56, sous escorte de la gendarmerie, elles quittent la gare de Dijon pour le camps de Pithivier.

Elles s'appelaient :
Hermann GERSON, 37 ans, arrêté à  Crépey,
Malka HERKOWITZ, 38 ans, vivant rue Jean Jacques Rousseau à Dijon,
Erna KAHN, 40 ans, réfugiée d’Alsace à Châtillon-sur-Seine,
Szmul KALEKA, 44 ans, de Voulaines-les-Templiers,
Thérèse KATZ, 17 ans, habitant à Dijon rue Paul Thénard,
Herta KOHLMANN, 21 ans, vivant rue Babeuf à Dijon (rue de la Chouette),
Aron KUPERBERG, 18 ans, arrêté à Crépey
Ruberg MAKAROWSKI, 44 ans, également arrêté à Crépey
Edmond MICHEL, 37 ans
Irma MICHEL, 34 ans et
Lillie MICHEL, 40 ans, tous trois de Dijon, rue de la Charmette
Anita OPPENHEIMER, 19 ans habitant Dijon, rue Paul Thénard
Jaqueline RIBSTEIN, 19 ans également de Dijon, rue des Perrières
Erich ROSNER, 17 ans arrêté à Crépey
Severin SAFRYS, 28 ans arrêté à Messanges
Nathan SALTMAN, 29 ans  et
Samuel SCHACHTER, 36 ans arrêtés à Crépey
Rose STEINITZ, 44 ans, et
Mireille STEINITZ, 17 ans vivant à Dijon, avenue Victor Hugo
Rachel ZLOTOWITCZ, 36 ans habitant Dijon, rue de la Manutention
Joseph ZYSKIND, 41 ans arrêté à Crépey.

Le 17 juillet, elles étaient déportés par le convoi numéro 6 vers Auschwitz Birkenau, vers une mort programmée par les nazis, avec la complicité du gouvernement de Vichy.
Selon les informations à notre disposition, seul Samuel Schachter7 a survécu à la déportation. Jacqueline Ribstein8 est parvenue, quant à elle, à échapper à la déportation grâce à son mari qui l'a fait évader.

Entre 1942 et 1944 se sont 76000 hommes, femmes, enfants dont le seul crime étaient d'être nés juifs qui ont été déportés depuis la France.
En 1945 2500 d'entre eux étaient survivants mais comme l'a rappelé Simone Veil lors d'une cérémonie en l'honneur d'Elie Wiesel : « Même si nous avons survécu, nous ne sommes jamais totalement sorti des camps » 

Photos Nicolas Richoffer (Infos Dijon) 
 Mme Tenenbaum, M Rochette, Mme Khattabi, M Delatte, M Schmeltz
 

 M Sylvain Blandin

Dépôt de gerbe par les associations:
mémoire(s) vive(s), Association Cultuelle Israélite de Dijon, LICRA, SNCF

 

1www.jacqueschirac-asso.fr
2Le calendrier de la persécution des Juifs de France (volume 2) Serge Klarsfeld
3Archives départementales de la Côte d'Or ADCO 1090W41
4ADCO 1090W41
5« Etre juif sous l'occupation » Alain Bellassene
6ADCO 41M294
7http://convoi6.perso.neuf.fr/
8ADCO 1090W41

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